2013 Retraites sécu : le hold-up se prépare ! La jeunesse trinque !

Des réformes consternantes, notre système de retraite par répartition en a déjà connu depuis 1993 : 1995, 2000 (pour les retraites complémentaires du secteur privé), 2003, 2010… 2013 sera de nouveau une année de réforme ! Le gouvernement Ayrault, dans la droite ligne des projets du Medef, compte bien utiliser une nouvelle fois le pseudo-argument du déficit pour justifer la contre-réforme de notre système de retraite et plus généralement, de la Sécu.

Celle-ci s’inscrit dans la continuité des politiques d’austérité et de précarisation menées depuis quelques années : accords de compétitivité facilitant les licenciements (Accord national interprofessionnel – ANI), multiplication des contrats précaires, flexibilité, gel des salaires). Objectif : casser les systèmes de solidarité par le système de capitalisation.

20 ans de contre-réformes

L’offensive de l’État et du patronat a commencé en 1993, en plein mois d’août lorsqu’Edouard Balladur et Simone Veil firent voter leur loi contre le système de retraite par répartition du secteur privé. La durée de cotisation passait de 37,5 à 40 annuités. Le calcul du salaire de référence servant au calcul de la retraite s’allongeait des dix aux vingt-cinq meilleures années. Le montant des retraites n’était plus indexé sur les salaires mais sur les prix.

Faute de réactions syndicales, en 1994 et 1996, le patronat faisait subir aux retraites complémentaires du secteur privé une régression de même ampleur que celle passa en force et imposa les 40 qui avait été imposée aux retraites annuités de cotisation pour de base par la loi Balladur-Veil.

En 1995, Juppé s’attaque à la fois aux retraites de la Fonction publique et à celles des régimes spéciaux (SNCF, RATP, EDF-GDF…). Face à la force du mouvement social et des grèves, il ravala ses 40 annuités.

En 2003, Fillon ne commit pas la même erreur et s’attaqua uniquement aux salariés de la Fonction publique et jura, la main sur le cœur, que les salariés relevant des régimes spéciaux n’étaient pas concernés par l’allongement de la durée de cotisation. Malgré des millions de manifestants et près de six mois de luttes, le gouvernement passa en force et imposa les 40 annuités de cotisation pour qu’un salarié puisse bénéficier d’une retraite de base à taux plein. Cette défaite historique, dont certaines directions bureaucratiques des syndicats y prenaient largement leur part, devait inciter le pouvoir à continuer ses attaques.

En 2007, le gouvernement poursuivit les contre-réformes et imposa les 40 annuités aux salariés des régimes spéciaux.

En 2010, l’ensemble des travailleurs du privé comme du public subit l’allongement de la durée de cotisation et le recul de l’âge de départ en retraite après l’expression d’un vaste mouvement.

Aujourd’hui, c’est tout le salariat que le patronat et ses alliés comptent attaquer de front !

Au motif de l’aggravation du déficit des caisses de retraites à 20 milliards d’euros d’ici 2020, le gouvernement prépare une fois de plus une réforme sur le système des retraites. Alors qu’il n’avance que la régression entre allongement de la durée de cotisation et remise de l’âge de départ en retraite, le pouvoir se dit soucieux de «justice et d’égalité».

« Rappelons que le régime par répartition a été mis en œuvre après la guerre. Avant cette date, les régimes étaient des régimes purement par capitalisation. », déclarait Pierre Gattaz actuel président du MEDEF.

Nous voyons bien que l’objectif premier du patronat est de faire reculer suffisamment la retraite par répartition. En ce sens, le patronat fera tout pour détourner nos cotisations vers les assurances privées qu’il pourra investir en Bourse à son seul profit. En appauvrissant les retraités, patronat et gouvernement espèrent faire main basse sur le magot en forçant les salariés à se tourner vers une «épargne» individuelle pour compléter leur pension.

C’est ainsi qu’après l’initiative gouvernement du gauche (les lois Fabius en 2001) les fonds de pension à la française (PERP) tentent à présent de s’imposer comme incontournables. Par ce biais, les travailleurs deviennent propriétaires de titres boursiers, actionnaires, et par voie de conséquences exploiteurs d’eux-mêmes.

Particulièrement juteux pour le capital boursier, ce type d’épargne n’offre en revanche aucune garantie pour les salariés.

Ce système, inégalitaire et individualiste, s’oppose à l’idée même de solidarité.

Au Royaume-Uni, les adhérents d’un fonds de pension ne retrouvent que 50 % des sommes qu’ils ont versées sur leurs fonds. Les 50 % restants s’étant évanoui en frais de gestion divers et en dividendes pour les actionnaires ! Citons aussi l’affaire Enron, fond de pension américain qui s’est écroulé du jour au lendemain ! N’oublions pas que le système par répartition a été mis en place après-guerre suite à l’échec du système par capitalisation viagère pendant la crise de 1929.

Le salaire socialisé, la retraite par répartition, c’est quoi ?

Un employeur fait deux versements, l’un au salarié qu’il emploie, le salaire direct, composante individuelle ou salaire net au bas de la feuille de paye, l’autre aux caisses de Sécurité sociale (Assedic, maladie, retraite, etc.) sous forme de cotisations sociales proportionnelles au salaire direct: c’est la composante collective, le salaire indirect ou salaire socialisé.

La cotisation sociale fait donc partie intégrante du salaire. Réduire la cotisation sociale, sous prétexte de soulager les « charges » de l’entreprise, c’est réduire le salaire ! Elle n’est pas un prélèvement ou une charge, ni un impôt, ni une taxe, ni une épargne, ni une assurance mais du salaire ! Salaire lui-même défini en référence à un barème, un tarif négocié au sein des conventions collectives, basé sur une grille de classification et non pas sur les résultats de l’entreprise.

Cette cotisation sociale, répartie entre la part du salarié et la part dite patronale, représente environ 40 % du salaire brut.

Versée aux caisses, elle est immédiatement transformée en prestations sociales (elle transite en flux direct). Elle établit clairement le fait qu’à chaque instant, c’est le travail productif qui produit la valeur finançant la protection sociale, dont les retraites. C’est donc le salaire socialisé qui, en France, finance la protection sociale.

Le salaire socialisé permet la reconnaissance sociale de toutes les situations des travailleurs et de prendre en compte les aléas de la vie. Qu’ils soient actifs, précaires, chômeurs, retraités, les salariés sont reconnus en tant que travailleur : le chômeur indemnisé comme un salarié demandeur d’emploi, le retraité, comme un salarié pensionné.

Cet aspect est fondamental car il pose comme principes :

  • la solidarité entre les travailleurs
  • il confisque aux représentants de l’État la gestion d’une partie des revenus des travailleurs : le salaire socialisé. L’État intervient par l’impôt dans une logique d’assistanat, d’aide aux plus pauvres. Grâce à la cotisation, il n’y a pas de « pauvres » mais des « salariés inactifs », dont le revenu est maintenu.
  • La cotisation est une arme économique au service des travailleurs. Elle permet de financer les retraites, les allocations familiales, les remboursements des frais médicaux de millions de salariés. Elle est indexée sur le salaire net, et suit donc son évolution.

En tant que révolutionnaires, nous ne nous contenterons pas de maintenir le statu-quo de comptes «  équilibrés  » de la Sécu.

Les richesses produites dans les entreprises sont le fruit de l’activité des travailleurs, elles doivent donc leur revenir !

Le salaire socialisé est un levier pour se réapproprier notre dû.

C’est pourquoi la CNT considère qu’il faut rassembler l’ensemble des salariés sur la base d’un retrait de l’ensemble des contre-réformes depuis 1993 pour gagner la bataille sociale décisive qui permettra de gagner les suivantes (salaires, emploi, partage des richesses…).

Une manipulation idéologique : moins nombreux mais plus productifs

Les comparaisons des faiseurs de panique ne tiennent pas compte de la hausse de la productivité des actifs. Un actif de 1983 produisait bien moins de richesses qu’un actif de 2010 n’en crée à présent. Depuis 1983 et l’instauration de la retraite à 60 ans, la richesse créée par chaque actif a augmenté de 30 en euros constants. Cela signifie que 2 actifs d’aujourd’hui produisent quasiment autant de richesses que 3 actifs de 1983.

Le bon repère n’est donc la pas baisse du nombre d’actifs par retraité, mais la quantité de richesse produite et l’affectation de son produit. Car, de 1983 à aujourd’hui, la part des retraites dans le PIB n’a augmenté que de deux points, passant de 10,3 à 13 du PIB. Elle a donc augmenté moins vite que la productivité des actifs Ce repère est pourtant peu cité par les spécialistes. Tout vise à faire croire que la quantité de richesses produite dans le pays va stagner. Alors il faudrait calculer à montant de richesse constant au cours des quarante prochaines années ! C’est absurde ! Pour faire face à l’augmentation du nombre de retraités tout en annulant les contre-réformes qui ont frappé nos retraites depuis 1993, il faudrait augmenter de six points la part du PIB affectée au financement de nos retraites. En 2050, cela représente environ 230 milliards d’euros. Inutile de s’évanouir. Avec une augmentation de 2000 milliards à cette date cela laisserait encore 1670 milliards d’euros pour augmenter les salaires directs, les cotisations maladies ou réduire le temps de travail. Encore faut-il que les gains de productivité et le progrès technologique ne soient pas accaparés par le patronat.

L’espérance de vie et l’allongement de la durée de cotisations

Le premier des arguments avancés par les différents gouvernements de gauche comme droite pour remettre en cause nos acquis sociaux concernant les retraites, repose sur le fait qu’il serait normal de repousser l’âge légal de départ en retraites et d’allonger le nombre d’annuités puisque l’espérance de vie augmente.
La supposée augmentation de l’espérance de vie demeure largement différente pour un haut dirigeant et un travailleur du bâtiment. À cela, il faut prendre en compte un critère important : celui de l’espérance de vie en bonne santé ! Là, on constaterait qu’elle a reculé ces dernières années, les travailleurs ne pouvant pas profiter pleinement de leurs retraites.

Repousser l’âge de départ la retraite sous prétexte de « sauver » le système des retraites est particulièrement hypocrite quand on sait que les entreprises mettent au placard leurs salariés âgés et qu’au moment d’accéder à la retraite, 60 % des salariés ne sont plus dans l’emploi, licenciés, en pré-retraite ou encore trop cassés par le travail pour pouvoir continuer à le faire.

De plus, lorsque l’on connaît la situation du marché du travail, l’essor de la précarité ou encore l’allongement des études, il faudra nous expliquer comment travailler 43 ans et prendre sa retraite à 60, 62, voire 65 ans… L’augmentation des annuités nécessaires à 43 ans de cotisation pour une retraite à taux plein sera effective pour les générations nées à partir de 1973… Hollande avait promis de s’occuper des jeunes, voilà chose faite.

Quant à la possibilité offerte aux étudiants de racheter jusqu’à quatre trimestres de leurs périodes d’études, soit près de 4 000 euros pour une année, on voit mal qui en trouvera réellement les moyens !

Mais ne baissons pas les bras: la retraite est une affaire des jeunes car ils doivent aujourd’hui conquérir leur droit à la retraite face aux réformes successives, comme l’ont fait leurs aînés. Il n’y a pas de fatalité avant 1945 la retraite n’existait pas, tout comme la Sécurité sociale ou l’assurance chômage. Et pourtant, elles ont été créées grâce au rapport de force. Ne disons plus « de toute façon, nous n’aurons jamais de retraite » mais « battons-nous pour notre droit à la retraite, et nous l’obtiendrons ! ».

Le recul de l’âge de la retraite est une mesure inefficace et profondément injuste. La retraite n’est pas un cadeau mais un droit !

 

Le tract en pdf : Tract mobilisation concernant les retraites – journée du 8 octobre 2013