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Discrimination: une défaite de plus pour le Ministère du travail !

En 2016, nous vous avions conté la mésaventure d’un de nos camarades face à la direction de l’INT de discrimination syndicale aboutissant à la prolongation de sa formation lors de l’EPIT 2015.

En 2021, la cellule Allodiscrim, mise à disposition par notre Ministère, avait produit un rapport détaillé dont la conclusion fait clairement le lien avec les opinions syndicales de notre camarade. Le 22 décembre 2023 le tribunal administratif de Grenoble avait rendu une décision dans cette même affaire et enjoint le ministère à accorder la protection fonctionnelle à notre collègue. L’administration avait alors fait appel et le 17 avril dernier la juridiction administrative a une nouvelle fois condamné l’administration (décision de la CAA de Lyon sur Légifrance).

Dans cette affaire, le Ministère aura donc discriminé deux fois : la première par la prolongation illégitime de formation de notre collègue et la seconde, en refusant la protection fonctionnelle, pour se disculper de la première.

EPIT 2015, suite

Souvenez-vous de l’EPIT 2015. Le directeur de l’époque, Bernard BAILBE – portant légion d’honneur – avait visé un de nos collègues. Lui signant le livret de formation le plus mauvais de la promo, le seul négatif pour dire vrai, suite à des actions syndicales et la dénonciation d’absurdités à l’INTEFP. M. BAILBE avait envoyé un message clair au jury. Et le jury de suivre : notre camarade avait vu sa titularisation repoussée. Trois mois de prolongation, durant la période d’été mais devant réaliser un pseudo programme de « perfectionnement ».

Parmi les raisons alors invoquées pour justifier cette prolongation notamment des absences… pour faits de grèves dans la lutte qui avait alors lieu contre la loi travail en 2016. Notre camarade, en poste en Haute-Savoie, était également connu pour avoir participé à la dénonciation de l’affaire TEFAL, bien connue dans nos services.

Dans ce contexte, une discrimination nous paraissait ainsi plus que probable et nous avions dénoncé le grotesque de la manœuvre en mettant à disposition tous les documents et rapports de jury (tract de l’époque).

Après une mobilisation importante et un passage devant le jury, cette fois-ci du Ministère à Paris, il avait finalement été titularisé.

Notre collègue avait alors décidé, pour la cause mais via son affaire, d’attaquer BAILBE devant le tribunal judiciaire.

Honte de rien et entre-soi

Premier moment, saisir la cellule AlloDiscrim, élément du label diversité dont le Ministère est improprement fier. Les juristes de la cellule procèdent donc à une enquête sur la situation de notre camarade. Eh quoi ? L’hypothèse de la discrimination est retenue ! L’affaire devient donc légitimement pénalisable. Notre collègue demande donc une protection fonctionnelle en vue de déposer une plainte pour discrimination contre la direction de l’INT.

Le Ministère la lui refuse, par décision implicite. Notre collègue porte le dossier devant le tribunal administratif de Grenoble. Toute honte bue, le Ministère allait jusqu’à rejeter le rapport de sa propre cellule d’enquête sur les discriminations, sans apporter le moindre élément tangible. Logiquement le ministère avait donc perdu une première fois par décision du 22 décembre 2023. Qu’à cela ne tienne, on ne change pas une équipe qui perd, le ministère avait fait appel, n’a à nouveau amené aucun élément et… a une nouvelle fois perdu par décision rendu le 17 avril dernier.

Ce dernier jugement est exemplaire à bien des égards et mérite que l’on s’y attarde un peu.

Quelles leçons en tirer ?

Tout d’abord le jugement rappelle qu’en matière de discrimination le plaignant doit amener des éléments de faits laissant supposer l’existence d’un motif discriminatoire. Il revient ensuite à l’administration « de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à toute discrimination ».

Le rapport de la cellule Allodiscrim, le traitement différencié dans le reproche d’absences pourtant dûment justifiées et correspondant à un engagement syndical, et enfin les attestations des collègues formateurs contrecarrant un discours sur l’insuffisance professionnelle, constituaient suffisamment d’éléments de faits pour présumer l’existence d’une discrimination. En face l’administration n’avait… rien à dire. Car l’appréciation discrétionnaire du directeur ou l’invocation de la souveraineté du jury sur le mode « circulez ya rien à voir » (à cet égard l’administration avait précédemment refusé de produire les livrets individuels des autres stagiaires), n’ont pas suffi à convaincre le juge administratif.

Qu’on se le dise, les jury et le directeur de l’INT avec sa note discrétionnaire ne sont donc pas tout puissants. Chaque IET qui s’estime victime de discrimination syndicale ou autre doit maintenant savoir que s’il amène des éléments de faits, l’administration devra se justifier sous peine d’être condamnée. Notons aussi que dans ce cadre l’assistance d’un avocat n’a jamais été obligatoire et ce de la rédaction de la requête à l’audience.

Nous constatons une fois de plus que le Ministère peut perdre, il ne faut donc pas nous décourager. C’est la ligne hiérarchique qui se disqualifie un peu plus à chaque fois. Regardons-la, sans illusion, et n’hésitons pas à attaquer chaque fois que la situation le mérite.

Les limites à ce type d’agissements sont les limites que nous y mettons. D’abord par la lutte collective, solidaire et émancipatrice pour défendre nos droits et nos missions. Et parfois, malheureusement de plus en plus souvent ces derniers temps, les limites dites par les recours devant les tribunaux dont le juge administratif.

Par-delà les effets de structure, contre les agissements de nos hiérarques, contre les pressions patronales et politiques, il nous faut donc toujours combattre doublement : pour nos libertés individuelles et collectives et pour nos missions de service public au service des travailleurs.