charge de travail burn-out CNT

Travailler plus en étant moins ! Quand la charge de travail ne permet plus d’assurer le service public

Nos services connaissent une hémophile perte d’effectif (en ETP toute catégorie confondue même si la catégorie C reste la plus touché) depuis plusieurs années. A un sous effectif structurel, s’est cumulé la poursuite de la réduction des effectifs de notre administration programmée dans le cadre de la RGPP et de la MAP, que ce soit par le non remplacement des départs en retraite que par la fusion des corps de contrôle de 2010. Cette réduction c’est notamment traduite dans les faits par l’absence de compensation en ETP des passages en temps partiel. Le plan sapin poursuit l’effort de destruction de notre service public alors que la pénurie est autogérée à bout de bras par les agents pris dans l’étau d’assurer un service public de qualité en fonction de leur charge de travail.

Vampirisation des effectifs (poursuite de la MAP).

Le Secrétaire Général des Ministères Chargées des Affaires Sociales vient d’annoncer, dans une note, la pré-notification des effectifs de référence pour le programme 155 (Travail-Emploi). La saignée se poursuit :

La mission « Travail et Emploi » continue à être engagée sur une baisse de ses effectifs au titre de l’année 2014 dans les services déconcentrés. Cette baisse est liée :

« – à un schéma d’emploi 2014 de -117 ETP (-137 ETP pour l’ensemble du programme 155),

[…]

Chaque Di(r)eccte se voit notifier une baisse d’effectifs de référence en ETP, associée à une baise de masse salariale à respecter. La répartition des suppressions par catégorie A, B et C est laissée à votre appréciation.« 

En Rhône-Alpes, cela se traduit par une diminution en 2014 de 8 postes d’agent de catégorie C et de 21 postes toutes catégories confondues, en ETP. La note prévoit entre autre une baisse de – 36 postes de catégorie B pour la création de 22 postes de catégorie A.

Il n’est nul besoin d’être comptable pour voir que le compte n’y est pas !

Il n’est nul besoin d’être devin pour se rendre compte que la charge de travail des agents va encore augmenter.

Par ailleurs, il est déjà annoncé dans la note une suppression d’au moins 18 postes en 2015 sur la région, en ETP toutes catégories confondues.

Cela va se traduit concrètement par la suppression des postes vacants en deux coups de cuillères à pot obligeant les agents à assumer ce surplus de charge de travail en disant « vous voyez, on ne change rien, vous assuriez déjà très bien le travail malgré la vacance de ces postes ! Donc on continue comme ça et va falloir faire des efforts en plus, mais on est prêt à dialoguer avec vous… ».

Pourtant, il faut le dire et le répéter, la réduction des effectifs n’est pas une fatalité, et elle ne se justifie certainement pas par la sacro-sainte réduction des dépenses publiques. Rappelons que 65 milliards d’euros d’aides aux entreprises sont distribuées par l’Etat (4% du PIB) sans compter les niches fiscales… Nous pensons également que les comptes d’apothicaire sur les effectifs théoriques régionaux et départementaux ne sont que des os à ronger adressé aux syndicats pour masquer la pénurie.

Une morsure qui ne laisse pas de trace : généralisation des temps plein payés à temps partiel

Dans la mesure où le nombre de postes, qu’il soit national, régional ou local, est calculé en effectif physique, le principe de non compensation du passage à temps partiel constitue un moyen invisible permettant la poursuite de cette saignée depuis plusieurs années.

Ce subterfuge permet en effet de créer une distorsion entre le nombre de postes officiellement créés par le PMDIT pour répondre à la charge de travail qui est calculé en Equivalent Temps Plein (ETP) et l’effectif pourvu aujourd’hui en ETP sur l’ensemble de ces postes.

Combien sommes- nous à être à 80% et à assumer une charge de travail d’un poste à temps plein ? Combien d’entre nous ont-ils déjà eu du renfort ou une réduction de leur charge de travail suite à un passage à temps partiel ?

Et oui ! Vu qu’il faut bien répondre à la demande sociale, ainsi qu’à la demande institutionnelle interne et externe, la charge de travail ne diminue pas avec un jour de moins par semaine !

Du coup les agents n’ont plus qu’à augmenter leur productivité pour répondre autant qu’il est possible à la demande en plus de l’arbitrage nécessaire du fait du sous effectif chronique.

Ce jeu de dupe est à somme négative, car en plus du sous effectif du au manque de postes, se cumule un sous effectif en ETP qui se traduit concrètement bien souvent par la réalisation d’un travail à temps plein payé à temps partiel.

Rappelons, afin d’éviter toutes discussions stériles, que l’organisation du travail à temps partiel n’est évidemment pas le fait générateur de la surcharge de travail des agents. C’est bien l’absence de recrutement de nouveaux effectifs pour réaliser le travail non fait et maintenir un seuil d’effectif en équivalent temps plein stable, qui est générateur de la surcharge de travail à laquelle les agents sont contraints de pallier.

Les agents de contrôle au cœur de la saignée des effectifs avec la réforme SAPIN

Le Direccte de Haute Normandie vient d’adresser une note à l’attention des agents dans laquelle il est détaillé très précisément comment va s’orchestrer la diminution des effectifs d’agent de contrôle sur sa région. Il annonce que :

– 3 postes d’agents de contrôle seront transformés pour créer des DUC

– 3 autres postes alimenteront la section régionale de travail illégal

– 6 postes seront supprimés sur la direccte.

Grosso modo les collègues de Haute Normandie vont passer de 72 postes d’agents de contrôle + 2 ARM, à 64 postes d’agent de contrôle en section territoriale, et ce n’est pas moins de 3 postes d’agent de contrôle territorial qui seront, en Haute Normandie, supprimés pour honorer la construction de l’armée mexicaine prévue par la réforme.

En plus de la saignée de la MAP, la réforme SAPIN abreuve ainsi un peu plus nos sillons.

En Rhône-Alpes nous nous attendons à la même morsure. Il n’est pas besoin de faire défiler le pôle T dans les différentes UT pour nous expliquer qu’elle sera bénigne, nous savons qu’elle ne le sera pas. Le plan SAPIN constituera le couperet permettant de diminuer drastiquement le nombre d’effectif notamment d’agent de contrôle. Tout ça pour « renforcer » le ministère et la mission de contrôle… Dites merci à Michel !

Quelles sont les conséquences concrètes de cette réduction d’effectif sur l’exercice du métier d’agent de contrôle? Pour faire simple, la réduction entraine une surcharge de travail à laquelle les agents de contrôle pallient en réduisant les réponses aux demandes formulées par les salariés et en diminuant leur qualité (c’est-à-dire en diminuant notamment la réponse pénale). Comment le ministère fait-il pour masquer ce dysfonctionnement ? Comme toujours, par l’affichage et l’arbitrage autour de la notion de plan d’action!

On voit ainsi comment, par la réduction globale des effectifs, notre ministère s’évertue de transformer un corps de contrôle aux pouvoirs régaliens et aux missions de protection des salariés en un corps de conseiller à destination des entreprises aux missions de garant d’une économie concurrentielle.

L’essentiel n’étant pas pour le ministère qu’un service public soit rendu mais qu’on ne s’aperçoive pas qu’il ne l’est plus.

Charge de travail et service public de qualités = MOYENS

La pénurie est autogérée par les agents au nom de la continuité du service public. Cette notion d’intérêt général et supérieur repose de tout son poids sur des agents culpabilisés à outrance dès qu’ils osent dire stop à l’accroissement de leur charge de travail! Ils s’estiment responsables d’une situation qu’ils n’ont ni voulu ni mis en œuvre, ce qui du coup permet d’évacuer tout débat sur la charge de travail et la qualité du service que l’on veut rendre au public.

Pourtant il ne faut pas évacuer la question : quel service public voulons-nous ? Devons-nous assumer cette surcharge et rendre un service public au rabais ou l’essentiel serait d’être ici et ailleurs voire partout, surchargé et dépassé, et ou il faudrait afficher qu’on est là, même si on ne fait plus rien en profondeur ? Où sommes-nous prêt à défendre un service public de qualité ?

Si nous souhaitons assurer un service public de qualité, il nous appartient avant tout de définir les moyens nécessaires au bon fonctionnement de nos services. Or il n’existe pas de ratios susceptibles de garantir un niveau minimum en deçà duquel on ne rend plus un service public de qualité (ratio secrétaire / agent de contrôle; agent de contrôle / entreprise; agent de renseignement / nombre de salariés …)

Si nous pouvons autogérer la pénurie, nous pouvons de la même manière autogérer notre charge collective de travail en se fixant un seuil au delà duquel nous refusons de palier la pénurie orchestrée par notre hiérarchie.

Il ne faut pas oublier que charge de travail individuelle et qualité du service rendu sont intimement liées. Dès lors, se battre pour maintenir un service public de qualité revient à se battre pour limiter sa charge de travail. Faisons assumer cette pénurie politiquement par l’administration et cessons de nous culpabiliser.

Ne confondons pas solidarité entre collègue et suicide collectif. Le « collectif » qu’il nous appartient de construire n’est pas un collectif de mouton autogérant sa conduite à l’abattoir. C’est dans la lutte que nous construisons un collectif de travail solidaire.

Nous appelons donc les agents à se réunir en assemblée générales au sein de leurs UT afin de débattre et de définir des modalités de résistance à mettre en œuvre autour des revendications suivantes :

  • le passage de tous les contrôleurs du travail dans le corps unique de l’inspection par ancienneté;
  • le passage des agents de catégorie C en SA avec possibilité de passerelle vers le corps de l’inspection, et le recrutement d’agent de catégorie C en plus;
  • le doublement des effectifs en ETP et l’établissement d’un ratio agent-entreprise permettant de répondre réellement aux demandes des salariés.

 

Le tract en pdf : Travailler plus en étant moins ! Quand la charge de travail ne permet plus d’assurer le service public